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8 juillet 2009

Pour y voir plus clair dans les résultats du baccalauréat...

baccalaureat_bac_examen_188 (1)

De l'appoximation du vocabulaire employé pour commenter les résultats du bac.

Avant les épreuves de rattrapage qui feront encore augmenter la proportion de reçus sur l'effectif global [qui passe l'examen], le taux de réussite au "bac" est de 78,4% dont 47% avec mention. Ce premier chiffre est en nette élévation par rapport à l'année précédente : + 2% environ. Il ne faut pas confondre ce résultat avec la proportion de lycéens d'une même génération qui décrochent le baccalauréat et qui est beaucoup plus réduite : de 61 à 64% ces dernières années. La distinction n'est pas nette dans tous les esprits, y compris les plus éclairés. La preuve dernièrement dans l'article "Education" de l'Etat de la France 2009-2010 où Maria Vasconcellos et Constance Daniel écrivent, page 59, "le taux de bacheliers dans une génération est passé de 5% en 1950 à plus de 83% en 2007" et produisent un tableau statistique qui contredit radicalement leur propos à la page suivante en montrant que 62,5% d'une génération a obtenu le bac en 2005. La faute est peut-être due à une faute de frappe ou une mauvaise relecture car les deux universitaires sont en théorie deux spécialistes reconnus de la question.

Il faut rappeler que le calcul n'est pas simple. La génération statistique est une abstraction qui revient à définir le "rapport du nombre de lauréats à la population total de cet âge" à partir d'une année de délivrance de diplôme et non d'une année de naissance. Ce genre de calcul est toujours un peu abstrait et crée naturellement des complications assez semblables aux maladresses qu'on peut lire ça et là sur le taux moyen de fécondité pour une génération.

Paris, la Seine-Saint-Denis et la Bretagne : inégalités ?

Sur le sujet du taux de réussite, accordons nous deux petites remarques. La première concernant les mentions à Paris et la deuxième concernant les résultats à quelques kilomètres de là, en Seine-Saint-Denis. Un cinquième des bacheliers parisiens a obtenu une mention Très Bien d'après Marie-Estelle Pech du Figaro (lire ici). Deuxièmement, dans le Monde daté du 8 juillet, Adrien Chauvin écrit : "Néanmoins, d'importantes inégalités face à la réussite de ce diplôme persistent à l'échelle nationale. Un lycéen breton a ainsi plus de probabilités de se réjouir à la vue des résultats qu'un francilien. De tous les départements, la Seine-Saint-Denis, malgré une légère amélioration ces dernières années, reste l'un des plus mauvais élèves au niveau national."

D'abord, du point de vue du vocabulaire (maladroit) employé par le journaliste du Monde, deux remarques s'imposent :

- la première est qu'il ne faut pas confondre inégalité et disparité. Il n'y a pas d'inégalité de traitement entre les "jeunes du 93" et ceux de Bretagne puisque les épreuves sont les mêmes. En revanche, il y a une disparité dans les résultats qui provient (en théorie) d'un travail de valeur inégale le jour de l'examen. L'expression "inégalité face" est employée à très mauvais escient puisqu'elle fait penser qu'il s'agit d'une discrimination, ce qu'on ne peut pas déduire d'un taux d'admission.

- Deuxièmement, on ne peut pas écrire qu'un lycéen "a plus de probabilités" de faire une chose ou une autre. Les probabilités sont une science, peut-être faut-il le rappeler, qui possède un vocabulaire précis dont le mot "chance" fait partie. Il faut donc dire qu'un lycéen "a plus de chances" même si ce terme est clairement polysémique... surtout quand on a une "chance" d'échouer à obtenir à son examen.

Ce lapsus entre disparité de répartition et inégalité est malheureusement la marque du syndrome de l'homme pressé qui décrit des résultats en même temps qu'il les commente. Ce n'est certes pas très grave et il ne faudrait pas en tirer la conclusion que le "niveau des journalistes" baisse car cela poserait des problèmes statistiques encore plus importants.

Note :

1. Photo de Fred Dufour extraite de : http://www.lexpress.fr/medias/376/baccalaureat-bac-examen_188.jpg

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Commentaires
A
Bonjour, <br /> <br /> Si on raisonne par l'absurde et que le taux de réussite soit strictement le même dans tous les établissements, alors il n'y aura aucune disparité mais peut-être que des inégalités terribles seront masquées par ces résultats. Un taux de réussite ne nous renseigne que très imparfaitement sur d'éventuelles inégalités ! Par exemple, pour le brevet, les notes du contrôle continu en banlieue sont surévaluées, donc l'inégalité peut aussi être en défaveur des élèves parisiens. Donc, il faut faire attention avant d'analyser des pauvres taux de réussite ! Pour arriver à prouver une inégalité, il faut plus que ça. Je sais que certains géographes comme Philippe Gervais-Lambony ou Bernard Bret parlent facilement de "justice spatiale" ou d'inégalités. Personnellement, leur travaux sont passionnants mais je leur reproche exactement ce que je vous reproche, d'être trop rapide dans le passage du commentaire pure à l'analyse personnelle. Autrement dit "de voir ce qu'on a envie de voir". <br /> <br /> Evidemment, votre expérience vous permet en conscience de parler d'inégalités et je dois vous avouer avoir la même expérience que vous. Mais il s'agit ici de parler du travail des élèves et s'il est mauvais, peut importe l'origine de l'élève, il doit obtenir une mauvaise note, c'est un grand principe d'égalité. Quant aux conditions de travail, l'éducation nationale n'a pas un traitement inégalitaire des élèves du secondaire (contrairement au supérieur quand on compare l'argent dépensé pour chaque étudiant à la fac et chaque étudiant des grandes écoles). Donc, il ne faut pas négliger a priori les arguments qui tendent à montrer l'égalité entre élèves. La critique ne dispense pas d'être juste. De même l'inégalité pourrait être au service des personnes qui en souffre (discrimination positive), c'est déjà en grande partie le cas et les statistiques ne le montrent pas ! <br /> <br /> Enfin, les élèves ayant tous une histoire, une famille, un "capital social", des goûts et des capacités différentes, on ne peut pas poser comme principe que l'égalité doit passer par des résultats identiques. Pour moi, c'est poser le problème à l'envers. Bien entendu, votre réflexion est légitime mais elle dépasse complètement le cadre d'une étude de résultats au bac qui montre tout au plus des disparités.
A
Vous citez un journaliste du Monde que je connais relativement bien puisqu'il s'agit de moi même. Je vous écrit sans aucune animosité ou orgueil mal placé, bien au contraire, je pense que l'enchange est constructif.<br /> C'est avec une attention comparable à la vôtre que j'ai lu cet article. Je comprends et aimerais partager entièrement votre point de vue sur la différence entre "inégalités et disparités". J'avoue avoir longtemps réfléchi à l'utilisation du terme exact, mais au regard de mon expérience (études secondaires en "province" et travail pendant 3 années dans un lycée de Seine Saint Denis) je penche plutôt vers l'inégalité. Même si le terme est peut être maladroit, les conditions d'enseignement et d'apprentissage sont rigoureusement et malheureusement différentes.<br /> <br /> Mais peut-être pourrions nous en discuter plus longuement par mail ou par téléphone.<br /> Quoiqu'il en soit merci, et je le dis sans aucune flagornerie, de revenir sur ce point qui me semble fondamental dans l'approche du système éducatif.<br /> <br /> Cordialement<br /> <br /> Adrien Chauvin
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