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24 juin 2009

Mort de Robert Lafont.

Robert Lafont est mort.

Une amie a envoyé un mail ce matin pour prévenir que le linguiste Robert Lafont était mort hier. Nous nous associons à la peine de sa famille. La perte pour les occitanistes est immense. Il fut, quoi que l'on pense sur la qualité de son oeuvre, de ses travaux et de ses positions, une des personnes marquantes de l'histoire du Midi, un fantastique érudit. Il a été adulé par une partie des locuteurs d'oc qui ont vu en lui un intellectuel capable de donner un souffle politique à la revendication "occitane". Mais son livre de 1971, Décoloniser en France : les régions face à l'Europe fut une véritable déception, tout comme sa vraie-fausse candidature aux élections présidentielles de 1974 où les élus du Midi rouge ne se bousculèrent pas pour lui donner leur signature. Robert Lafont n'était pas, malgré ce qu'on a bien voulu lui faire croire, un homme politique. En tous cas, il faut lui reconnaître le mérite de ne pas avoir cherché à politiser à outrance l'IEO. Malheureusement, des difficultés au sein de cette association l'ont obligé à la quitter en même temps que le courant "universitaire" qu'il représentait en 1981 (on ne peut pas s'écarter de la ligne impunément là-bas non plus...) En fait ce geste était le pendant de celui de Felix Castan mis en minorité quelques années plus tôt. Derrière cet affrontement, il y avait une lutte d'influence importante pour définir la position de l'IEO, changer les rapports économiques avant de reconquérir la langue (Castan) ou se concentrer sur la langue et ne pas mélanger le Parti Occitan avec l'IEO (Lafont). Maintenant que Robert Lafont est mort, il semble évident que personne n'a jamais écrit cette histoire, surtout pas Laurent Abrate, chantre de l'histoire officielle. L'IEO n'aime pas revenir sur ces faits passés qui resteront donc toujours dans l'ombre.

Ne croyez pas, cher lecteur, que notre propos est irrévérencieux mais nous ne pouvons pas rendre hommage à un homme si contrasté en ne traitant que sa partie éclairée. Robert Lafont laisse une oeuvre considérable (plus d'une centaine d'ouvrages) dont dernièrement les très intéressants Lo viatge grand de l'Ulisses d'Itaca (Lou viage grand de l'Ulisse d'Itaco...) et son essai sur l'Etat et la langue. Il fut le grand artisan de l'écriture occitane et de son adaptation pour le Provençal. Relisons ses livres, ce sera le plus bel hommage qu'on puisse lui faire car une page se tourne et avec elle une grande partie des débats qu'il a animé. Quelle tristesse.

A lire sur ce blog : Mort de Robert Lafont (suite)

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Commentaires
F
comme le disait Freud dans malaise dans la culture, il existe un combat qui échappe totalement aux conventions internationales sur les bonnes pratiques militaires et l’usage des armes de destruction massive, c’est celui qu’on appelle le “combat contre ses vieux démons”, c’est un combat où tous les coups sont permis entre les belligérants.
M
Son esprit n'était que lumière vive, comme un phare d'espoir, dans ce fleuve obscur de notre histoire qui s'étire depuis huit siècles. C'était un homme libre et généreux, il restera notre guide pour atteindre l'inaccessible étoile à sept branches qui scintille dans le ciel d'Occitanie.
J
Je tiens à exprimer ma réaction, qui est celle d'un des nombreux enfants intellectuels de Robert Lafont, heureux qu'il leur ait appris un mode de réflexion et d'action aux antipodes d'un dogmatisme, le cheminement de Robert Lafont l'ayant conduit (cf. le texte du manifeste Gardarem la Tèrra) à faire converger dès l'été 2003 les dimensions sociales, culturelles et écologiques dans la construction d'un fédéralisme démocratique mondial. Je me contente de reprendre ci-dessous le texte du communiqué de Gardarem la Tèrra, qui a engagé depuis plusieurs mois la préparation d'un colloque réellement ouvert au débat sur 50 ans d'action et d'écrits politiques d'un intellectuel occitan engagé, qui a donc assumé le risque de commettre des erreurs et de donner l'impression d'un parcours chaotique selon les vieux critères d'opposition entre la droite et la gauche, plutôt que de se complaire dans la tour d'ivoire que pouvait lui offrir un classique travail d'universitaire et d'écrivain. <br /> <br /> Les membres et amis du mouvement altermondialiste et occitaniste Gardarem la Tèrra, lancé le 9 août 2003 sur le Larzac sur la base d'un manifeste écrit essentiellement par Robert Lafont, ont appris avec beaucoup d'émotion ce mercredi 24 juin son décès, après plusieurs mois de dégradation de son état de santé ayant interrompu depuis début 2008 la poursuite de son oeuvre de socio-linguiste, d'écrivain et d'intellectuel engagé au meilleur sens du terme. C'est une grande figure de l'histoire européenne du XXème siècle (il était né à Nîmes le 16 mars 1923); après avoir participé à la Résistance,  il a notamment été en 1945 l'un des fondateurs de l'Institut d'Etudes Occitanes dont il demeura durant 35 ans un acteur majeur.<br /> <br /> D’une culture exceptionnelle et d’une force de travail au-dessus du commun, Robert Lafont n’avait cessé, depuis 1946, de mener de front une ?uvre de création profondément originale, abordant tous les genres (théâtre, poésie, roman, avec plus de 40 titres publiés) et les travaux de recherche et de critique en linguistique (16 titres), en littérature (20 titres) auxquels s’ajoutent, à partir des années 60, les essais historiques et politiques (22 titres). Dans tous ces domaines, il a créé, innové, surpris, modifié les perspectives, ouvert des voies nouvelles.   <br /> <br /> Il joua aussi un rôle déterminant dans la création du Comité Occitan d'Etude et d'Action né de la rencontre lors de la grande grève des mineurs de Decazeville entre vie culturelle occitane et action sociale. En passant par une tentative de candidature à l'élection présidentielle de 1974 récusée par le Conseil Constitutionnel, de Lutte Occitane au début des années 70 au Parti Occitan (et par là dans Région et Peuples Solidaires, partie prenante du succès d'Europe Ecologie aux dernières élections européennes) mais aussi dans un large arc politique allant de la démocratie chrétienne à la façon catalane de Jòrdi Pujol au Nouveau Parti Anti-Capitaliste à la façon souveraineté populaire à tous les niveaux de Raoul Marc Jennar, sans oublier un long bout de chemin avec le Parti Communiste Français en lien particulièrement avec Maurice Verdier, Robert Lafont a fait avancer des analyses et propositions politiques en rupture avec le césaro-bonapartisme de l'Etat français. <br /> <br /> En permettant à des acteurs sociaux "différents" de réfléchir et d'agir ensemble autour de lui,  il a également largement contribué à l'exceptionnel mouvement social de début 1976 qui vit en Languedoc-Roussillon un mouvement de forces populaires réunissant Comité Régional d'Action Viticole, CGT, CFDT, FEN et CID-UNATI prolongé en 1978 sous forme d'une amorce d'états généraux du peuple pour « Vivre, Travailler et Décider au Pays »... Avec Emmanuel Maffre Baugé et Jean-Pierre Chabrol, on le vit ensuite à la tête du manifeste "mon país escorjat". On le retrouva plus tard à l'initiative du Club Mutations puis du Forum de l'Innovation Sociale et Politique avant que la nécessité de mieux articuler réflexion et action ne le conduise à faire proclamer le manifeste Gardarem la Tèrra lors du grand rassemblement Larzac 2003.<br /> <br /> C'est de ce manifeste qu'est né, avec le soutien concret de Robert Lafont, le mouvement Gardarem la Tèrra, qui s'est rapidement structuré en deux comitats de país (nimesenc et montpelhierenc) avec quelques membres et correspondants un peu partout, y compris bien au-delà de l'espace occitan. Ce mouvement a en particulier réalisé deux "caravanes occitanes" (février 2004 et octobre 2005) et a réalisé un coin forums ainsi que l'organisation de la soirée aux arènes lors de la manifestation "anem òc per la lenga occitana" du 17 mars 2007 à Béziers; un remarquable texte en occitan de Robert Lafont a été lu et diffusé à cette occasion. Depuis plusieurs mois, à l'initiative de son Comitat dau País Nimesenc, Gardarem la Tèrra prépare, pour les 26 et 27 septembre à Nîmes, un colloque nourri par une quinzaine de contributions et comportant deux tables-rondes avec des témoins-acteurs sociaux et politiques. <br /> <br /> Alors que pour beaucoup de ses membres et ami-e-s, Robert Lafont a été une sorte de père en occitanisme ouvert sur le monde et qu'ils s'en sentent aujourd'hui douloureusement orphelins, Gardarem la Tèrra veut que la tenue du colloque du 26 et 27 septembre, préparé pour donner un nouvel écho à son oeuvre alors que son état de santé ne lui permettait déjà plus d'agir avec nous,  soit un hommage vivant à sa pensée dynamique indissolublement liée à une action engagée et lucide. Comme il est écrit dans la plaquette de présentation du forum (qui peut notamment être demandée à l'adresse internet "gardaremlaterra@yahoo.fr"), "Robert Lafont, écrivain, linguiste ou historien, nous donne une infinité de clés, dans une intelligence du monde et de soi qui ouvre de nouveaux horizons à l’action collective". L'être de chair et de sang est mort à 86 ans révolu, mais avec Gardarem la Tèrra, il continue à nous dire, comme appel à la poursuite de l'action et de la réflexion, selon la dernière expression (en français et en occitan) du manifeste du 9 août 2003: <br /> "Vive le Peuple de la Terre !<br /> Visca lo Pòble de la Tèrra !"
A
Madame ou Monsieur, Mes salutations, <br /> <br /> Je ne voudrais pas nous vieillir mais L'histoire des années 1970, comme la lave après l'éruption, est malheureusement un objet scientifique qui a refroidi depuis longtemps. Quand bien même cette histoire serait plus récente, il n'y aurait pas d'empêchement à l'aborder comme l'a fait Marc Bloch ("L'étrange défaite") et maintenant l'IHDTP pour d'autres champs d'études. <br /> <br /> Ceci étant dit, André Sérail dans le "Livre blanc sur la régionalisation" publié par le Félibrige en 1971 disait au sujet de la "Révolution Régionaliste" de R. Lafont parue en 1967 (citation de la page 92) : "Tout félibre devrait lire et méditer ce livre. Il y trouvera une excellente critique des abus de l’étatisme et du capitalisme, tels qu’ils sévissent actuellement. Malheureusement, à défaut d’une foi profonde et d’une doctrine précise, l’auteur n’apporte pas de solutions constructives. Sa révolution régionaliste reste bien confuse et incomplète." <br /> <br /> En effet, les livre de 1967 ou de 1971 ne définissent même pas le régionalisme. Robert Lafont est continuellement dans le flou épistémologique et quand il en sort, c'est pour proposer, page 296, "la collectivisation de la production agricole", de disperser "les industries de pointe" dans les campagnes et de conserver, je le cite toujours à la page 298, "le secteur tertiaire non parasitaire (service public, enseignement, santé)". C'est du charabia pseudo-économique de prof de Lettres et surtout rien ne prouve que cela sauvera les langues minorisées. Mais Robert Lafont est alors adulé par une intelligentsia régionale vaguement gauchisante qui lui fait perdre tout sens des réalités et surtout lui fait croire qu'il est un grand penseur politique. Il faut regarder la réalité en face : ses livres ne sont que des plans à tiroirs remplis d'idées préconçues sur à peu près tout, sauf l'essentiel c'est-à-dire des propositions concrètes de lois pour déconcentrer ou décentraliser l'administration. Mais comme il ne maîtrise pas cette partie technique, il n'en parle même pas. Alors, évidemment, en 1974, il retombe de son nuage. <br /> <br /> Mais ne croyez pas que cette histoire me fasse rire, c'est tout le contraire.
J
L'histoire ne s'écrit pas à chaud, et elle reste à écrire concernant les soixante dernières années de l'occitanisme. De là à dire que vous avez été déçu par un essai politique, sans plus de précisions... quels arguments avez-vous contre ce livre ?
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